Innover pour progresser : les essais de robots

La robotisation permet aujourd’hui d’alléger le travail des viticulteurs mais également de rendre ce métier beaucoup plus attractif notamment auprès des jeunes générations. En effet, certains travaux de la vigne tels que le binage, le broyage, la coupe de l’herbe et très prochainement la pulvérisation font l’objet d’essais sur le vignoble de Cognac. Zoom sur ces innovations.  

VITICULTURE DE PRECISION

Pour réduire son impact sur l’environnement et dans le contexte de changement climatique, la filière viticole dans son ensemble va devoir, à l’avenir, s’appuyer sur une multitude de données pour mieux comprendre et répondre aux besoins de la vigne. À terme, un exploitant pourra connaître de façon précise ses terroirs parcelle à parcelle, automatiser l’enregistrement de ses pratiques, s’appuyer sur des outils d’aide à la décision toujours plus performants et automatiser certaines tâches qui demandent de la main d’œuvre. De plus en plus de start-ups s’emparent de ces sujets et proposent des solutions innovantes. « Sur les domaines Rémy Martin, nous avons fait le choix de nous préparer à cette transition pour essayer d’acquérir autant que possible une expertise sur le sujet », explique Laura Mornet, Responsable Conseil Fournisseurs et Recherche & Développement Viticulture de la Maison Rémy Martin. « Avec l’appui de systèmes d’informations, nous sommes en mesure de référencer géographiquement l’ensemble des parcelles de nos domaines, utiliser certaines données, telles que la valeur NDVI1 pour évaluer l’hétérogénéité de nos parcelles. Depuis plusieurs années, nous testons la pertinence et fiabilité de ces mesures et déterminons des zonages intra parcellaires. Dans un futur proche, ces différentes acquisitions permettront d’adapter nos pratiques à une échelle plus fine et enrichir nos outils d’aide à la décision pour avoir une analyse encore plus précise au vignoble. »

DES ROBOTS DANS LA VIGNE 

Un moindre recours aux produits phytosanitaires implique de gagner en capacité d’intervention et en réactivité dans tous les domaines d’entretien du vignoble. La robotisation des opérations d’entretien telles que le désherbage mécanique des cavaillons constitue une autre voie de recherche prometteuse. Avec plusieurs avantages à la clé : l’arrêt de l’utilisation des herbicides, la suppression des rejets dans l’atmosphère du COet des polluants émis par les moteurs de tracteurs et une réponse à la pénurie de main d’oeuvre dont souffre Cognac et d’autres territoires viticoles. La solution ressemble à la conduite automatique des automobiles. Grâce à de multiples capteurs et au GPS, le robot est capable de se guider de façon autonome dans le vignoble. Le modèle Bakus fabriqué par l’entreprise française VitiBot et commercialisé depuis 2017 se déplace à la même vitesse qu’un tracteur avec une autonomie de fonctionnement de 8 heures sur batteries. Il est capable de biner et de tondre l’herbe en travaillant simultanément sur deux demi-rangs grâce à l’enjambement de la vigne. Principe similaire sur le modèle 

TED de Naïo Technologies mis sur le marché en 2019. À terme, ces robots pourront exécuter tous les travaux d’entretien de la vigne, de la pulvérisation confinée au désherbage mécanique du cavaillon. 

RENDRE LE MÉTIER DE VITICULTEUR PLUS ATTRACTIF 

Mathilde Boisseau, en charge des 180 hectares de vignes exploitées en propre par Hennessy, expérimente la robotique sur une parcelle de 10 hectares. « Nous utilisons le robot TED de Naïo dans le cadre d’un projet R&D, sur une surface plane avant de le tester sur des pentes », indique-t-elle. « Le robot a l’avantage d’être moins lourd qu’un tracteur ce qui limite le tassement du sol, il est 100 % électrique et peut également embarquer des capteurs pour améliorer les observations au vignoble ». Mathilde Boisseau souligne l’intérêt de cette solution pour répondre au manque de main d’œuvre lorsque les travaux de culture des sols et de protection du vignoble se chevauchent, mais également « pour rendre le métier de viticulteur plus attractif en raison de l’appétence des jeunes pour les nouvelles technologies et pour l’expertise que développe la robotique ». 

ALLÉGER LE TRAVAIL DES VITICULTEURS 

Élodie Miremont, directrice des 190 hectares des domaines viticoles Camus, partage cette analyse. Elle estime que la robotisation, dont elle surveille les progrès, va conduire à une évolution du métier de viticulteur. « Nous allons changer de type de main d’œuvre mais nous aurons toujours besoin de salariés », indique-t-elle. Une évolution qu’elle considère comme très positive. « Nos métiers sont souvent pénibles et certains ouvriers qui ont commencé à travailler très jeunes souffrent dès l’âge de 45 à 50 ans de tendinites chroniques », note Elodie Miremont. Outre les robots, elle mentionne les exosquelettes qui pourraient soulager les employés et éviter certains problèmes de santé. 

BINAGE, COUPE DE L’HERBE ET BIENTÔT PULVÉRISATION 

« Ce robot est efficace pour le binage sous le rang et le broyage de l’herbe dans l’inter-rang », déclare Bernard Pineau, responsable de la Viticulture Durable chez Martell Mumm Perrier-Jouët qui utilise le « Bakus » du français Vitibot sur son vignoble champenois. L’entreprise a également souhaité investir au capital de la start-up qui produit les robots afin de pouvoir accompagner son développement et travailler, à leurs côtés, sur des nouvelles applications utiles aux vignobles. « La pulvérisation est d’ailleurs en cours de développement et va arriver » ajoute-t-il. Non polluant grâce à ses moteurs électriques, le robot dispose d’une autonomie de 8 heures de fonctionnement. Autre utilité de ce robot, ses capteurs embarqués qui permettent de suivre au plus près les pieds de vignes. « Grâce aux capteurs embarqués, nous pouvons surveiller l’état sanitaire de la vigne et ainsi avoir une approche au plus près des besoins d’intervention ». Le Bakus est disponible depuis 2020 en version vignes larges et sera testé sur les vignobles Martell en 2021.